La légère reprise amorcée en mai dans l’industrie mondiale du fret aérien se confirme en juin. Mais elle reste modeste et inférieure aux attentes, sur fond de réduction des acheminements en extrême urgence. Cette situation rejaillit sur les taux de fret, orientés à la baisse.
La demande de fret aérien à l’échelle mondiale, mesurée en tonnes-kilomètres, a diminué de 17,6 % en juin par rapport à la même période de l’année précédente (-19,9 % pour les opérations internationales). "Il s’agit d’une modeste amélioration comparativement à la chute de 20,1 % en glissement annuel observée en mai", constate l’Association du transport aérien international (IATA).
Sur l’ensemble du premier semestre 2020, les volumes ont chuté de 14,5% par rapport à la même période de 2019. "La comparaison des courbes permet de constater que l’impact du Covid-19 sur les volumes, en données corrigées des variations saisonnières, est similaire à celui de la crise financière de 2008-2009", détaille l’IATA.
Concurrence du rail et du maritime
La stabilisation de la production manufacturière et des commandes à l’export dans la plupart des régions du monde, après une forte période de baisse, laissait pourtant espérer de meilleurs résultats en juin. "Cette relative contre-performance s’explique par la perte de parts de marché du fret aérien constatée depuis quelques mois, les chargeurs se tournant vers des moyens de transport", indique l’IATA dans son analyse de marché mensuelle. "La course pour acheminer des équipements de protection personnelle (ÉPP) vers les marchés s’est atténuée alors que les chaînes d’approvisionnement se sont régularisées, ce qui a permis aux expéditeurs d’utiliser les options de transport ferroviaire et maritime moins coûteuses", précise le CEO de l’IATA, Alexandre de Juniac. Un constat qui vaut notamment pour le corridor Asie-Europe. Tout en restant proportionnellement marginal, le rail a connu une progression particulièrement remarquable sur cet axe.
Une exploitation perturbée
Le secteur aérien souffre aussi d’un contexte d’exploitation toujours largement perturbé. La capacité mondiale, en tonnes-kilomètres, affiche un repli de 34,1 % en juin 2020 par rapport à la même période de 2019 (-33,9 % à l’international). Une contraction sensiblement identique à celle constatée en mai (-34,8 %). Compte tenu de l’interruption encore massive des vols passagers liée à l’épidémie de Covid-19, les capacités cargo disponibles en soute ont diminué de 70 % en juin par rapport à juin 2019. Un déclin qui n’est que partiellement compensé par l’augmentation de capacité à bord des avions tout cargo (+32%).
L’Amérique du Nord relativement épargnée
La baisse de trafic concerne encore les transporteurs de toutes les régions au mois de juin, comme en mai. Toutefois, l’Amérique du Nord continue de s’en sortir plutôt mieux, notamment grâce à la forte représentation des intégrateurs, moins touchés par les perturbations. Les transporteurs européens restent en revanche dans une forte zone de turbulence, tout comme leurs homologues d’Asie/Pacifique. En raison du ralentissement des exportations aériennes d’équipements de protection personnelle, ces derniers ne profitent pas pleinement de la reprise de la production manufacturière.
Sur les autres marchés, le Moyen-Orient reprend quelques couleurs, grâce à "des stratégies opérationnelles dynamiques de certains transporteurs de la région", estime l’IATA. L’Afrique, qui commence à sentir davantage les effets de la pandémie, note en revanche une certaine détérioration, malgré "le petit marché Afrique-Asie qui a poursuivi sa progression en juin, avec un taux de croissance de 20,1 %", précise l’IATA. Enfin, pour les compagnies d’Amérique latine, la situation est d’une gravité absolue, avec de strictes mesures de confinement et une pénurie considérable de capacités.
Les prix poursuivent leur baisse
Le manque global de capacités a généré en avril une forte hausse des taux de fret aérien. Juin vient confirmer la décrue amorcée en mai. Selon nos données Upply, sur l’ensemble du mois de juin, deux corridors affichent encore une croissance par rapport à mai : l’intra-Asie et l’Europe-Amérique du Nord. En revanche, l’évolution entre la première et la dernière semaine de juin laisse à penser que la tendance à la baisse se généralise.
Source : Upply, Solution "Comparer & Analyser"
Elle devrait se poursuivre tant que la demande mondiale de bien n’aura pas véritablement rebondie. Si cette reprise intervient brutalement, cela pourrait stimuler le transport aérien de marchandises, les entreprises devant alors reconstituer rapidement leurs stocks. Mais pour l’instant, compte tenu de la situation sanitaire mondiale, rien ne permet d’anticiper à court terme un tel mouvement.