Analyse Transport & Logistique

Tanger Med : chronologie d’une ambition

02 janvier 2020

DOSSIER. En 20 ans, le Maroc a développé à Tanger Med un écosystème logistique qui a séduit aussi bien de grands opérateurs maritimes que des chargeurs de premier plan. Comment s’est construit ce succès ? Upply vous retrace cette aventure dans une série d’articles qui démarre par cette chronologie des opérations.

Le projet de créer un hub de transbordement à Tanger remonte au milieu des années 90. Plusieurs espaces sont alors étudiés pour choisir le lieu d’implantation de ce vase projet logistique. La Méditerranée l’emporte finalement au détriment de l’Atlantique. C'est donc sur le détroit de Gibraltar, face au port d'Algésiras, que le royaume chérifien pose la première pierre du port. "Le choix méditerranéen s'explique par sa position à la croisée entre les routes maritimes est-ouest et nord-sud, ainsi que par la volonté du roi de s'ancrer dans l'espace euro-méditerranéen", explique Hassan Abkari, directeur général adjoint de Tanger Med Port Authority.

1/ Tanger Med 1

En 1999, le site de Tanger Med est défini et en 2002, le roi Mohammed VI pose la première pierre lors d'une cérémonie d'inauguration des travaux. Le chantier de Tanger Med 1 s’amorce deux ans plus tard, et en 2006, les premiers portiques sont installés. Le premier terminal de Tanger Med 1 ouvre officiellement ses portes en juillet 2007 et le second l’année suivante.

  • Le terminal 1 est concédé à APM Terminals, filiale de APM Moller Mærsk, et à la société Akwa, un consortium d'entreprises marocaines. Il dispose d'un linéaire de quai de 800 m pour une capacité de 1,5 MEVP.
  • Le terminal 2 est attribué à un consortium composé d'Eurogate à hauteur de 40%, CMA CGM pour 40% et MSC pour 20%. Il dispose de 800 m linéaires.

En 2008 commencent également les travaux du terminal passagers et du port roulier de Tanger Med, qui jouxtent Tanger Med 1. L'ouverture intervient en 2010.

  • Le terminal roulier a joué un rôle majeur dans l’implantation de Renault à proximité du port, qui se concrétise en 2012. Exploité par la société française STVA, filiale du groupe CAT, ce terminal dispose de 440 m linéaires de quai. Il s'étend sur 20 hectares, dont 13 hectares concédés à STVA pour le compte du groupe Renault (la filiale du groupe CAT gère la quasi-totalité des flux). Les 7 hectares restants sont gérés par une filiale de Geodis avec un statut de "common user" pour permettre à tous les constructeurs automobiles de travailler au départ de Tanger. Le terminal traite ainsi les trafics automobiles en provenance de l'usine PSA de Kénitra. Les véhicules sont acheminés par train. L’investissement a été réalisé par Gefco, qui loue ces trains à PSA. La manutention sur le terminal est ensuite réalisée par STVA. En 2018, Tanger Med a traité sur l'ensemble du terminal roulier 479 321 véhicules, soit une progression de 11% par rapport à l’année précédente. La partie du terminal dédiée à Renault a réalisé un trafic de 383 715 automobiles, dont 351 191 destinées à l'export. À l'import, le terminal a traité 39 679 unités. Sur la partie "common user" du terminal, 88 451 véhicules ont été traités. Un trafic qui devrait augmenter en 2019 avec la montée en puissance de l'usine PSA de Kénitra.
  • Le terminal passagers, qui accueille désormais les ferries, permet au port de la ville de Tanger d'éviter des files de camion en centre-ville. Il s'étend sur 30 hectares, dont 10 ha dédiés au transport routier comprenant notamment des scanners et des zones pour la fouille des camions, une zone pour les véhicules en sortie du Maroc avec des postes d'inspection, une zone pour les véhicules en entrée au Maroc et enfin, une zone de régulation pour le trafic routier international. En 2018, 2,8 millions de passagers ont emprunté ce terminal. Quant au trafic routier international, il s'est établi à 326 773 unités, en progression de 14% par rapport à 2017.

2/ Les zones franches

En 2009, c'est au tour des zones franches industrielles et logistiques de sortir de terre. Au total, six zones logistiques voient le jour. La première est située en arrière du port. Les cinq autres, Tanger Free Zone, Tanger Automotive City, Renault Tanger Med, Tetouan Park et Tetouan Shore vont ensuite sortir progressivement de terre.

Au total, les zones franches industrielles et logistiques, que nous détaillerons dans le volet 3 de ce dossier, s'étendent aujourd’hui sur 1 600 hectares. Environ 900 entreprises occupent les terrains :

  • De grands noms de la logistique internationale comme DHL, Bolloré Logistics, Panalpina ou encore le groupe émirati Emirates Logistics, filiale du groupe Sharaf.
  • Des distributeurs : Decathlon, Adidas, Bosch ou encore Huawei ont choisi d'implanter sur le port marocain des centres logistiques qui rayonnent dans toute la Méditerranée occidentale, du Maroc à l'Algérie en passant par l'Espagne et la France.
  • Des industriels : L'industrie automobile avec Renault et PSA, mais aussi Siemens qui construit des pâles d'éoliennes pour les parcs du monde entier, des sous-traitants de l'automobile comme le Japonais JTeckt, le Coréen Hands ou encore le Chinois ZTT.

Ces zones franches peuvent encore se développer. Tanger Med Zones a demandé que soient réalisées plusieurs études dans la perspective de nouvelles ouvertures. Avec une réserve foncière de 3 600 hectares supplémentaires, Tanger Med veut confirmer sa position de premier hub de la logistique portuaire en Méditerranée. Des projets sont d’ailleurs d’ores et déjà en cours. En avril dernier, par exemple, l’équipementier automobile nippon Mitsui Kinzoku Act a lancé la construction de son usine de production de mécanismes de verrouillage de portes, d’un investissement global de 12,5 millions d’euros.

3/ Tanger Med 2

Dès l'inauguration du terminal de Tanger Med 1, le roi Mohammed VI a demandé la construction d'un second port à conteneurs. En 2008, la décision est prise, en pleine crise économique mondiale. Les travaux de Tanger Med 2 commencent en 2015.

Cette nouvelle infrastructure comporte deux terminaux. Le premier, le terminal 4, a démarré ses opérations le 28 juin 2019. Concédé à APM Terminals, il dispose d'un linéaire de quai de 820 m avec une capacité de 5 MEVP. En janvier 2020, le terminal 3 va entrer à son tour en activité. Concédé à Marsa Maroc, il s'étend sur 800 m linéaires avec une capacité de 1 MEVP.

Tanger Med 2 offre au total 1600 m linéaires de quai et une capacité de 6 MEVP par an. L'ensemble du complexe portuaire dispose donc désormais d'une capacité totale de 9 MEVP. Les deux terminaux de Tanger Med 2 ont nécessité un investissement d'un peu plus de 1 Md€ de la part des opérateurs. Chacun disposera de quatre portiques overpanamax.

Après Tanger Med 1 et 2, l'agence spéciale ne prévoit pas la construction d'un troisième terminal. TMSA dispose d'une participation dans le futur port de Nador, situé sur la Méditerranée, qui viendra compléter l'offre portuaire marocaine. S’il est prévu que Nador soit davantage dédié aux vracs, comme les hydrocarbures, les céréales et les minerais, un terminal de marchandises conventionnelles, dont les conteneurs font partie, y est aussi prévu avec un quai de 1 520 m linéaires. Ce port devrait être opérationnel en 2021.

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De formation juridique, Hervé Deiss a rejoint la presse spécialisée transport, logistique et maritime depuis plus de 20 ans. Il s’est affirmé au cours de ces dernières années, comme un expert des systèmes portuaires du monde entier.
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